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samedi 19 septembre 2015

Le cas Elliot ALDERSON (Mr ROBOT)



La demande 
Une évaluation psychologique de Elliot ALDERSON est demandé par sa psychothérapeute, Mme Krista GORDON. 

Contexte 
M. ALDERSON est un jeune ingénieur informatique spécialisé en cybersécurité. Il travaille actuellement à Allsafe Security. Les difficultés rencontrées par sa psychothérapeute pendant le traitement l’amènent a demander un second avis. 

Procédures d'évaluation 
M. ALDERSON a été reçu en entretien clinique pendant 50 minutes

Résumé des résultats en fonction du but de l'évaluation et de la demande initiale 
Les éléments recueillis pendant l’entretien clinique permettent de répondre a la demande d’évaluation

Anamnèse 
Monsieur ALDERSON est fils unique. Son père est décédé d’une leucémie lorsqu’il était enfant. Les effets de cette disparition ont été aggravés par le fait qu’a partir de ce moment sa mère est devenue maltraitante

Les loisirs de M. ANDERSON sont entièrement consacrés à l’informatique. Il passe un nombre important d’heures a lire les forums Internet et surfer les profils des réseaux sociaux. Il aime observer la vie de ses concitoyens, de ses collègues, et même de ses amis au travers des fenêtres du réseau. Il se voit parfois comme un “vigilente”, un “white hat” apportant ordre et justice à la société par des actions vengeresses. 

Il a peu de relations sociales. Il évite toute situation dans laquelle il risque de devoir interagir avec d’autres personnes. La seule personne avec laquelle il a un lien véritable est une amie d’enfance. C’est elle qui a insisté pour le faire entrer à Allsafe Security. Il y a fait ses preuves en se montrant compétent et disponible. 

Monsieur ALDERSON prend des stupéfiants mais se décrit comme non dépendant. Il utilise un cocktail de morphine et de suboxone qui, de son avis, doit le maintenir à l’écart de tout problème de dépendance.

Monsieur ALDERSON se vit comme très différent des autres personnes. Il traverse à certains moments d’intenses moments de dépression et de solitude qui agravent son sentiment d’être au-delà de toute possibilité d’aide. 

Comportement pendant l’entretien et observations Monsieur ALDERSON est un homme blanc de taille moyenne. Sa constitution est relativement menue. Il ne présente pas de handicap physique ou sensoriel. Il est habillé d’une façon banale, avec un jean et un polo à capuche. 

Pendant l’entretien, Monsieur ALDERSON est sur la defensive. Il semble lointain, peu investi dans la situation qu’il semble observer comme de l’extérieur. L’expression est rapide, comme sous pression. Le contact visuel est souvent rompu. Il peine a suivre les règles habituelles de la conversation qui n’est finalement possible que parce qu’il fait des efforts notables. Monsieur ALDERSON est généralement penché en avant et s’exprime d’un ton monocorde qui ne s’anime que lorsqu’il parle de “Evil Corporation”. Il est alors dynamisé par une colère qui enfle au fur et à mesure qu’il dit tout le mal qu’il pense de "Evil Corporation"

Les préoccupations autour de “Evil Corporation” sont excessives. Il désigne par là une entreprise tentaculaire, maléfique, oeuvrant dans l’ombre sauf pour des personnes suffisament éveillées comme lui, et travaillant à la destruction des consciences. 

Résultats et intégration
Les difficultés de M. ALDERSON sont anciennes puisqu’il décrit une enfance pendant laquel son seul interlocuteur était son père. La disparition de celui-ci a du être un catastrophe privant M. ALDERSON de la seule personne qui contribuait au développement de son Self. En effet, lors de ses échanges avec un interlocuteur privilégié, un enfant trouve trois choses différentes : 1) un miroir qui le confirme dans son sentiment de perfection, de grandeur et de vigueur psychique; 1) un idéal avec lequel il peut fusionner comme image de calme, d’infaillibilité et d’omnipotence et 3) un alter-ego auquel l’enfant souhaite s’identifier. Avec la mort de son père, ce sont ces fonctions qui sont ne sont plus assurées, ce qui a porté un coup grave à son développement psychique. Les effets de la perte ont été d’autant plus grand que la mère de M. ALDERSON est devenue maltraitante.

La mise en cause profonde du Self a conduit a la mise en place d’un clivage horizontal. M. ANDERSON garde par devers lui les idées de grandeurs ou il est fusionné avec l’objet parfait que constitue son père. Celui ci garde cet aspect de perfection parce que les éléments négatifs sont projetés dans le monde extérieur et représentés sur la forme de la Evil Compagny. 

L’absence laissée par la mort du père se traduit pas un sentiment de vide intense qui est combattu par la recherche de stimulations. On trouve ici une des racines des conduites toxicomaniaques de M. Elliot ANDERSON. La recherche de stimulation se traduit également par les sessions intenses et prolongées avec les ordinateurs que ce soit pour de la programmation ou du hacking. Dans le premier cas, M. ALDERSON semble chercher un état d’excitation minimal ou la différence entre lui et le monde extérieur n’a plus d’importance. Il est comme tout entier contenu dans les limites de son écran. Dans le second cas, il cherche un objet détruire. Les investissements sadiques qui portent cette recherche sont dénié et projetés sur l’objet extérieur

Le diagnostic est 
297.1 (F22) Trouble hallucinatoire, type persécutoire, premier épisode, en cours
311 (F32.8) Autre Trouble Dépressif
300.23 (F40.10) Anxieté sociale

Recommandations
La poursuite de la psychothérapie de Monsieur Elliot ALDERSON est recommandée. Il est souhaitable que sa psychothérapeute centre davantage le travail sur les projections paranoiaques qui couvent sous la dépression.

Résumé 
Monsieur ALDERSON est adressé pour avis par sa psychothérapeute. Il est recommandé de poursuivre le traitement et de prendre en compte la dimension paranoiaque de ses troubles.

jeudi 23 février 2012

Représentation des angoisses adolescentes dans les films cultes

L’adolescence est un moment catastrophique à la fois par l’ampleur des changements mis en jeu et par leur rapidité. Les films cultes portent les traces de ces bouleversements psychiques dans les thèmes qui sont abordés, mais aussi dans la manière dont l’espace est traité.
Sébastien Dupont montre que les films cultes chez les adolescents mettent en avant plusieurs types d’espaces : l’immensité et le vide, les espaces enfouis, les espaces intermédiaires et les limites de l’espace humanisé.
Les immensité que les films comme Star Wars mettent si bien en valeur correspondent au sentiment de l’adolescent qui perçoit un monde nouveau. Quittant le monde de l’enfance, l’adolescent qui voit l’infini des possible s’ouvrir à lui est saisit de vertiges. L’espace peut dont aussi être perçu comme vide ou insuffisamment soutenant. L’angoisse de ne plus être soutenu par les parents ou l’environnement est alors traduite dans des images de gouffres sans fin dans lesquels le héros risque sans cesse de tomber. Parfois, le vide est objet de défis : il est alors le support de rêveries associées au vol comme dans Top Gun (Tony Scott, 1986) ou dans Star Wars lorsque le personnage maitrise “la force”
Aux immensités s’opposent dans l’imaginaire adolescent les espaces réduits et confinés. Ces espaces renferment des peurs infantiles : peur d’être enfermé, enterré, écrasé, mangé … Elle sont figurées par les situations dans lesquelles le héros se retrouve dans un environnement confiné dont les limites se réduisent peu à peu : l’enterrement de Black Mamba dans Kill Bill, l’emprisonnement de Luke et ses compagnons dans L’empire contre-attaque (Irvin Kershner, 1980) en sont deux exemples
Les espaces peuvent aussi être des espaces intermédiaires. Beaucoup d’actions se déroulent dans des espaces qui ne sont ni l’inconnu des immensités vides, ni le trop connu des espaces clos. Ce sont des espaces publics, anonymes, intermédiaires entre le connu et l’inconnu. Les squats dans Le péril jeune en sont un exemple.
Enfin, les films cultes adolescents mettent en scène un dernier type d’espace. Ce sont les limites de l’espace viable et/ou humain qui sont alors représentés. Ils expriment le désir inconscient de retourner à un état de nature imaginaire qui serrait libéré des pesanteurs des relations interhumaines. Le grand bleu (Luc Besson, 1988) met en scène ce fantasme dans l’abandon de Jacques aux profondeurs de la mer.
Ainsi, le culte que vouent les adolescents a certains films tiennent au fait qu’ils traitent de leurs angoisses. La répétition des visionnages, l’apprentissage par cœur des dialogues leur permet de traiter petit à petit les angoisses profondes auxquels les soumettent le processus adolescent. Les représentation de d’espaces trop grands ou trop vides, trop étriqués, enfouis, intermédiaires ou vides de la présence humaine leur permettent de traiter les angoisses d’une psyché insuffisamment tenue , ou trop à l’étroit dans un corps, d’avoir des représentations de ce qui se passe à l’intérieur de soi (le corps comme caverne primitive), de se trouver des lieux ni trop proches ni trop lointains, ou rêver d’une vie loin de l’industrie humaine.

pdf-file-logo-icon (1)Dupont S. (2010) Les représentations adolescentes de l’espace dans les films cultes : l’immensité, le vide, les espaces enfouis, intermédiaires. In Jocelyn Lachance, Hugues Paris, Sébastien Dupont Film Culte et culte du film chez les jeunes 
Sébastien Dupont blogue sur http://blogadolescence.canalblog.com

jeudi 16 février 2012

Psychothérapie et séduction dans la culture populaire et dans le champ clinique

On se souvient que le Docteur Paul Weston, psychothérapeute de son état, souffre de la tendre inclinaison qu’il a pour une de ses patientes. Le cas n’est pas limité à la fiction. Un sondage effectué en 2006 après de 575 psychothérapeutes montre que 87% d’entre eux ont été attirés sexuellement par un patient. Un minorité non négligeable (9,4% des hommes et 2,5% des femmes) sont passés à l’acte. L’attirance sexuelle provoque des sentiments de culpabilité, de l’anxiété ou de la confusion, pourtant près de la moitié des psychothérapeutes concernés n’ont pas cherché de l’aide.

psychothérapie et séduction dans la culture populaire

Dans la culture populaire, les relations psychothérapeute patient ont souvent été mise en avant. Très récemment, les relations entre Karl Gustav Jung et Sapina Spielrein ont fait l’objet d’un film qui montre à quel point la psychanalyse pouvait être “une méthode dangereuse”

Les dangers de la séduction sont assez récurrents dans la culture populaire. Le cas le plus fréquent est celui d’une psychothérapeute femme séduisant un patient homme.  27 films concernent ce cas de figure, tandis que le cas de psychothérapeutes hommes séduisant une patiente sont moins nombreux (15). Je ne connais pas de cas de séduction homosexuelle.

Psychothérapeute femme séduisant un patient (d’après Glen O. Gabbard, Krin Gabbard )

  • Spellbound (1945)
  • High Wall (1947)
  • Dead heat an a Merr-Go-Round (1966)
  • Zelig (1983)
  • From beyond (1986)
  • Hunk (1987)
  • Mr. Jones (1993)
  • Tin Cup (1996)
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    Psychothérapeute homme séduisant une patiente (d’après Glen O. Gabbard, Krin Gabbard )

  • Carefree (1938)
  • Lilith (1964)
  • Lovesick (1983)
  • Bad Dreams (1988)
  • Husband and Wifes (1962)
  • The Net (1995)
  • Bliss (1997)
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    Ces films mettent en image un fantasme de séduction, c’est à dire une “scène réelle ou fantasmatique, où le sujet (généralement un enfant), subit passivement, de la part d’un autre (le plus souvent un adulte), des avances ou des manœuvres sexuelles” (Laplanche et Pontalis). Ces fantasmes de séduction sont en lien avec le complexe d’Œdipe. La séduction est qui le plus souvent mise en scène est une séduction maternelle. On pourrait la traduire ainsi : “une mère séduit un fils”. Est-ce du fait que la situation de psychothérapie est une situation de soin, et que par conséquent elle rappelle les soins qu’une mère donne à son enfant ?

     

    Psychothérapie et séduction dans le champ clinique

    Carol Martin a exploré la question  en utilisant la méthode clinique. 13 psychothérapeutes (7 hommes), dont deux psychologues cliniciens et deux psychanalystes ont été interrogés sur la manière dont ils ont pu être attirés sexuellement par des clients, et la manière dont ils ont géré la situation. Tous s’accordent à reconnaitre les moments ou les frontières sont franchies mais le consensus est moins évident lorsqu’il s’agit de fantasmes.

    L’attirance sexuelle est considérée comme normale et non nécessairement dommageable pour le patient mais le consensus devient moins précis lorsqu’il s’agit de définir ou commence et ou se termine l’attirance sexuelle. Pour certains, les fantasmes du psychothérapeute sont problématiques, pour d’autres ils font partie du processus psychothérapeutique et doivent être pris en compte par le psychothérapeute. Le psychothérapeute doit prendre conscience de l’attirance sexuelle et des affects qui y sont associés (anxiété, culpabilité, honte) et traiter la question d’une façon qui soit finalement bénéfique pour le patient.

    La crispation sur le cadre du traitement est le signe d’un échec de ce processus. Il produit par ailleurs souvent chez le patient l’impression d’être rejeté et peut conduire à une fin prématurée de la psychothérapie. Les postures moralisatrices ou omnipotentes, la projection sur le client des désirs sexuels, les passages à l’acte sous forme de caresses, d’étreintes, les rencontres en dehors du  cabinet en sont d’autres signes

     

     

    pdf-file-logo-icon (1)Martin, C., Godfrey, M., Meekums, B., and Madill, A. (2011). Managing boundaries under pressure: A qualitative study of therapists’ experiences of sexual attraction in therapy. Counselling and Psychotherapy Research, 11 (4), 248-256 DOI: 10.1080/14733145.2010.519045

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