mercredi 29 juin 2011

Si j’étais toi…

-IMAGEALT-La perception peut être manipulée de façon à ce qu’une personne ne perçoive plus les limites de son corps. Elle peut alors vivre l’illusion qu’elle a changé son corps avec quelqu’un d’autre ou même avec un mannequin. L’illusion fonctionne lorsque la personne est immobile ou en mouvement mais elle ne fonctionne pas avec un objet qui n’a pas l’apparence d’un corps humain.

Pour réaliser cette illusion, on a donné un casque 3D a deux sujets se faisant face. Lorsque les sujets se serrent la main, la vision du cobaye est celle de son vis à vis. Il se voit donc échanger une poignée de main du point de vue de l’autre. C’est à ce moment qu’il a l’illusion de changer de corps.

L’expérience a été réalisée avec un mannequin. Un expérimentateur touche avec une baguette le ventre du cobaye et du mannequin. Le cobaye a le champ visuel du mannequin et a là aussi l’impression qu’il a changé de corps.  Par contre, l’illusion ne fonctionne pas si on remplace le mannequin par une chaise.

Une autre expérience utilisant un dispositif similaire amenait aussi des personnes à se projeter en dehors de leurs corps. Ils étaient équipés d’un casque qui restituait l’image d’une caméra pointée vers l’arrière. Lorsque l’on touchait leur poitrine en faisant apparaitre en même temps une main dans le champ de la caméra, les personnes avaient l’impression d’être touchées mais en dehors d’elles même. Après l’expérience, les personnes localisaient l’

En faisant correspondre les signaux perceptifs et cutanés à l’intérieur du champ visuel d’une autre personne, il nous est possible de vivre l’illusion l’expérience de posséder son corps.

 

pdf-file-logo-icon (1)[4]If I were you: perceptual illusion of body swapping. PLoS One 2008;3(12):e3832. Epub 2008 Dec http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/19050755?dopt=AbstractPlus

lundi 27 juin 2011

Les hommes prennent plus de risques devant des femmes…. même virtuelles

-IMAGEALT-

Par certains aspects, la psychologie masculine est extrêmement prévisible. Chacun a pu constater à quelque point le comportement des hommes est modifié lorsqu’ils sont sous le regard de femmes. Les hommes ont tendance a en faire un peu plus voire même un peu trop dès que le public se féminise. Par exemple, les hommes traversent plus volontiers lorsqu’ils se savent regardés par des femmes. Ils ont donc tendance à prendre davantage de risques. A contrario, les hommes ont plus tendance à attacher leur ceinture lorsqu’ils sont avec des hommes que lorsqu’ils sont avec des femmes. L’interprétation classique est que dans l’idée des hommes, les femmes sont impressionnées par leur capacité à prendre des risques. Ils auront tendance à se protéger davantage lorsqu’ils sont en présence de rivaux potentiels.

Ce comportement a été mis en évidence dans un environnement virtuel. Des sujets étaient équipés d’un casque virtuel. Ils se retrouvaient alors devant un pont suspendu délabré. L’état du pont, et sa hauteur vertigineuse  invitaient à la plus grande prudence. Et effectivement, les sujets ne s’y engageaient qu’après une longue hésitation. Ils faisaient preuve de la plus grande prudence prudence, testant longuement chaque planche avant de faire un pas de plus.

Lorsqu’ils étaient placés sous le regard d’un avatar féminin se trouvant de l’autre coté du pont, le franchissement était beaucoup plus rapide.

En ligne comme hors ligne, les femmes font prendre des risques aux hommes. Il faudrait vérifier si cela marche aussi dans les MMO : est ce que les avatars masculins prennent plus de risque dès lors qu’il y a dans le groupe des avatars féminin ?

mardi 21 juin 2011

La vue subjective renforce l’impression de réalité

Une des grandes révolutions du jeu vidéo a été de pouvoir proposer une vue subjective en première personne. Le cinéma nous avait déjà préparé avec des plans dans lesquels les choses étaient vues “à la place de”. Le spectateur voyait alors la scène par les yeux d’un des personnages, le plus souvent un agresseur, ce qui augmentait grandement les émotions et le sentiment d’immersion.

Cette perspective est devenue possible autour du jeu DOOM (ID Sofware, 1993) qui a été le premier a proposer une vision subjective donnant ainsi naissance a un nouveau genre : les  first person shooters.

Mais l’idée selon laquelle la vision subjective provoque plus d’immersion est elle valide ? Si l’on en croit une expérience réalisée avec un environnement virtuel, c’est le cas.

Le dispositif expérimental est le suivant : des hommes sont équipés d’un casque virtuel. Ils voient une mère secouer sa fille par les épaules puis la gifler. Les sujets sont eux même secoués par les épaules par des assistants.

Au moment de la gifle, ils présentent des réactions émotionnelles importantes.  Leurs réactions sont moins vives lorsque le point de vue n’est pas en première personne mais en troisième personne. Par ailleurs, ceux qui ont eu les réactions physiologiques les plus importantes sont aussi ceux qui ont eu le plus fort sentiment d’habiter l’avatar.

Pour les auteurs de l’étude, cela montre d’une part que les sujets de l’étude se sont approprié le corps virtuel de la fillette et d’autre part que cette appropriation est facilité par la vision subjective.

samedi 18 juin 2011

Les travailleurs sociaux ont ils droit aux réseaux sociaux ?

Les réseaux sociaux ont bouleversé les paysages numériques.  Ils les ont rendu moins virtuels, et plus réels. L’internet n’est plus une destination lointaine, il est a portée de doigts, dans nos téléphones et sur nos tablettes.

Ils permettent d’agréger des foules ou des communautés à partir d’un dénominateur commun. Dans la vie de tous les jours, ils rendent des services que l’on ne peut pas trouver ailleurs. Ils sont des lieux de détente et des espaces de recherche, quoi que cette recherche puisse concerner. Les réseaux sociaux ont transformé nos vies en d’immenses silos d’information.

Sur Facebook, Twitter, Flickr, Youtube, Foursquare, des vies s’écrivent, en mots, en images, en films. en localisation. Les les de voeux sur Amazon disent les gouts de lecture, les objets que l’on aime, les films que l’on regarde. Les projets et les destinations de voyage se lisent sur Tripatini

La facilité avec laquelle les contenus peuvent être mis en ligne et partagé participe grandement du succès des réseaux sociaux. Les réseaux sociaux ont en retour modifié la perception que nous avons du cyberespace. Auparavant, il était une destination lointaine réservée à quelques aventuriers excentriques. Aujourd’hui, il est plutôt un entourage de nos vies professionnelles et personnelles.

Pour les travailleurs sociaux, cela pose sinon des difficultés, du moins des questions. Une partie de la formation et du travail des travailleurs sociaux consiste à différencier les questions privées et les questions professionnelles.  Un éducateur, un psychologue, ou  un assistant social ne fait pas part de ses positions politiques, religieuses ou de ses préférences sexuelles. Il prend garde à ce que ses positions n’interviennent pas dans son travail. Cette réserve lui permet de se mettre au service des personnes avec lesquelles il travaille. Le but de cette réserve  est de ne pas gêner le client du fait de ses opinions ou de ses goûts personnels.

Pourtant, les opinions politiques, religieuses et les préférence sexuelles de chacun peuvent être reconstruites à partir d’un profil Facebook. Même si la personne renseigne pas les champs de son profil, les personnes, les favoris et les pages avec lesquelles elle est liées en disent beaucoup.

C’est précisément la différence entre ce que l’on garde par devers soi au travail et ce que l’on partage avec d’autres dans sa vie privée  que les réseaux sociaux ont tendance à diminuer, voire même à effacer complètement.  Les réseaux sociaux posent un problème nouveau aux travailleurs sociaux et à leurs institutions professionnelles. Pour la première fois, le cadre de travail sur lequel les travailleurs sociaux s’accordent est remis en cause par le mouvement de société.

Comment faire pour maintenir ces cadres de travail tout en restant dans le mouvement du monde. Il ne s’agit pas en effet de renoncer à la réserve dont les travailleurs doivent faire preuve. Il ne s’agit pas non plus de renoncer au cyberespace. Il s’agit de travailler avec cette nouvelle donne. Il s’agit d’être présent sur le réseau d’une manière qui ne fasse pas obstacle au travail.

La voie du Ninja.

Une première solution consiste à disparaitre comme personne privée du réseau. Certains travailleurs sociaux ne sont pas présents sur Facebook pour cette raison. D’autres utilisent Facebook avec des profils fermés. Cela nécessite cependant une connaissance suffisante du réseau social et une attention soutenu aux modification des conditions d’utilisation. L’expérience montre que Facebook ouvre de plus en plus les profils au monde extérieur et il n’y a pas de raison que cette tendance cesse.

L’utilisation d’un pseudonyme peut rendre des services. Dans ce cas, la personne utilisera un ou plusieurs pseudonymes sur l’Internet Mais il faut se rappeler que le pseudonymat sur Internet est toujours relatif. L’identité en ligne a plusieurs composantes (le nom, l’email, l’adresse I.P., les avatars, les personnes et objets liés) et en faisant des recoupements il est possible de faire correspondre différentes identités en ligne. .

Il est possible d’utiliser un pseudo. Mais le pseudonymat sur Internet n’est que relatif. Par ailleurs, le pseudonyme étant choisi, il est porteur d'informations personnelles. Cela est tout autant vrai pour les avatars et les adresses emails. Découvrir que son psychiatre s’appelle Casimir sur un forum peut être attendrissant ou effrayant, ou tout ce que l’on voudra, mais il est évident que cela jouera un rôle dans la relation psychothérapeutique

L’utilisation de pseudonymes pose un autre problème. Il raréfie la présence des travailleurs sociaux et rend difficile le repérage des professionnels. Sur Internet, tout le monde peut être un travailleur social. Si en France les titres de psychologue et de psychothérapeute sont cadrés par la loi, tout le monde peut se dire coach, éducateur, ou assistant social. On en arrive à un traitement wikipedien de difficultés personnelles que certains apportent en ligne : les avis de tous se superposent et se valent

Chevaucher le dragon.

L’autre solution est de chevaucher le dragon. Dans cette perspective, les réseaux sociaux seront utilisés d’une manière professionnelle. 

Le plus simple est de faire comme nous avons fait avec le téléphone. Nous avons tous un numéro professionnel et un numéro personnel. La convention veut que les clients nous joignent sur notre numéro de téléphone professionnel. Il arrive qu’il y ait quelques débordements ou confusions, mais ce moyen de communication est tellement intégré dans les pratiques des travailleurs sociaux que ces problèmes sont à la fois vite repérés et traités.

De la même façon, il est possible d’avoir en ligne une identité professionnelle et une identité personnelle. L’identité professionnelle lie la personne à une institution. Par exemple, son adresse email pointera sur le nom de domaine de l’institution dans laquelle il travaille. Le nom de domaine cadre le type d’échanges que l’on va avoir. La lecture de d’une adresse email donne toujours au moins deux types de renseignements. Le premier est le nom par lequel la personne souhaite être appellée. Le second type de renseignement est donné par son domaine de rattachement.

On évitera alors les adresses fantaisistes et l’on optera pour un simple état-civil. Le prénom et le nom sont amplement suffisants puisque c’est à M. ou Mme Untel que les clients s’adressent. Il est possible d’adjoindre la profession, par exemple jean.untel-psychologue@ime.villex.fr . Idéalement, le nom de domaine renseigne sur l’institution de rattachement. Ici, on comprend que jean.untel travaille comme psychologue dans l’Institut Educatif de la ville x. Cela signifie que l’institution garantit que la personne est bien psychologue. Cela signifie aussi que lorsque la personne utilise cette adresse email, elle engage le lien qu’elle a avec son institution. Signer une pétition avec cette adresse, par exemple, n’est pas recommandé puisqu’elle engage à la fois l’individu Jean Untel et son institution l’Institut Médico Educatif de la ville X.

Il revient ici aux institutions de faire le travail nécessaire pour donner à leurs employés la possibilité d’une présence professionnelle en ligne.  Cela passe par des comptes email pour chaque employés, mais aussi des formulaires en ligne qui permettent à tout internaute d’entrer en contact avec un travailleur social. Rencontrer un assistant social et ne pas pouvoir lui écrire un mail est une expérience qui devient de plus en plus étrange.

Il est possible de faire plus encore que de se donner une carte de visite.  L’intérêt du Web 2.0 et des réseaux sociaux est de permettre de partager dynamiquement des informations. L’Internet est devenu tellement grand qu’il peut être difficile devant une information de savoir si elle est pertinente ou pas.

Par exemple, un Educateur Jeune Enfant pourra utiliser les listes de lecture d’Amazon pour signaler des livres intéressants sur le sevrage ou la grossesse. Une filmographie établie sur Gomiso pourra traiter de la situation des femmes tandis que les favoris de Foursquare indiqueront dans la ville les lieux utiles à une femme seule avec un enfant.

 

Etre sur le réseau professionnellement comporte plus d’avantages que d’inconvénients. Les bénéfices vont à la fois au réseau, c’est à dire pour une part aux clients,  et aux professionnels. D’un coté, l’information disponible sur les sujets traités par les travailleurs sociaux  sur l’Internet est de meilleure qualité puisqu’elle est cultivée par des professionnels. De l’autre, les travailleurs sociaux constitue une identité en ligne qui protège leur vie privée.

 

Crédit photo : Michel Ange, La tentation d’Adam et Eve

 

mercredi 8 juin 2011

Sur Internet les foules ne sont plus sages

Sur Internet, les foules ne sont plus sages. Une expérience de psychologie sociale porte un coup à ce qui était un dogme du Web 2.0

L’expression “La sagesse des foules” a été remise au gout du jour par James Surrowieki qui montre que les grands groupes sont plus compétents que quelques experts pour résoudre des problèmes, innover ou prendre des décisions intelligentes.

L’expression, bien qu’ancienne, a frappé les esprits parce qu’elle s’oppose à une constatation évidente. Qui a vu une foule de supporter de football a bien du mal a lui donner la moindre once de sagesse. Elle remettait également en cause toute une série d’expérience que la psychologie sociale a mené sur les processus groupaux au sortir de la seconde guerre mondiale jusque dans les années 1970

Ainsi, avec la “sagesse des foules”, la culture technique rejoignait une observation faite sur un marché anglais a début du 19ième siècle par Galton. Mieux, ce que la culture avait de plus en pointe était porté par les idées libérales de la main invisible. Curieux retournement d’un espace qui pour une partie a été porté par les idéaux et l’imaginaire de la contre-culture américaine des années 60-70

Wikipédia ? La sagesse des foules ! Facebook ? La sagesse des foules ? Twitter ? La sagesse des foules ! Les choses devenaient claires, et l’on pouvait faire du commerce.

 

Une expérience a montré que cette sagesse des foules était remise en cause dès lors que le groupe était soumis à de l’influence sociale et ce dans les taches les plus simples. Dans l’expérience, les sujets doivent reconsidérer leur réponse après avoir reçu une information plus ou moins complète sur les réponses des autres.

La “sagesse des foules” est altérée par trois effets différents.  L’influence sociale diminue la diversité des réponses. L’effet de réduction de la fourchette déplace la position de la vérité vers la périphérie. Enfin, l’effet de confiance rend les individus hyper confiants quant à leur estimation.

 

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How social influence can undermine the wisdom of crowd effect Jan Lorenza, Heiko Rauhutb, Frank Schweitzera, and Dirk Helbingb

 

 

En bonus, le premier chapitre de La sagesse des foules de James Surrowieki